Gabrielle Roy
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Préface — Est-ce que vous sentez une petite brise sur la galerie? C’est moi… Gabrielle Roy.
Je suis de retour, et je me vois ici dans mon hamac à l’âge de 8 ans. J’ai la coqueluche et je passe tout l’été là.
Dans les nuages je vois des châteaux et des chevaux et des explorateurs de l’Ouest. Ce gros nuage-là, c’est Louis Riel, le père du Manitoba.
C’est lui qui a mis le français et l’anglais à parts égales dans la constitution du Manitoba.
En 1916, ma première année d’école, le gouvernement du Manitoba a passé une loi interdisant l’enseignement du français. Louis Riel aurait été vraiment déçu!
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Chapitre 1 — Mon père, Léon Roy, il accueille les peuples de la terre entière!
Comme agent du gouvernement canadien, il aide les immigrants de partout dans le monde, de la France à l’Ukraine, à venir s’établir sur les terres de l’Ouest.
Aujourd’hui, j’entends de la cuisine la voix fatiguée de mon père qui revient de son long voyage dans l’Ouest.
Je suis surprise de le voir arriver sans son cheval.
Mon père pense que je ne peux pas l’entendre de mon hamac, mais je l’entends raconter à ma mère comment il a dû convaincre toute une communauté d’évacuer leurs maisons et leurs fermes pour se sauver d’un feu de prairie.
Mais lui, étant le dernier à partir, mon père s’est caché dans un puits pour se sauver la vie. Le cheval n’a jamais voulu partir sans lui, et il est mort dans le feu.
J’ai raconté cette histoire, Le puits de Dunrea, dans mon roman Rue Deschambault.
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Chapitre 2 — J’ai mon premier poste comme enseignante à Marchand au Manitoba. Dans cette petite école, je suis entourée d’enfants métis.
La journée de mon arrivée, mes élèves et moi sommes allés veiller au corps d’une compagne de classe morte de tuberculose.
Pour lui rendre hommage, on l’a couverte de roses sauvages. De ces enfants-là, j’ai appris plus de leur courage et de leur résilience qu’eux ont appris de moi.
L’enfant morte est mon récit de cet incident dans Cet été qui chantait.
Plusieurs de mes nouvelles et de mes romans ont été inspirés de mes années d’enseignement au Manitoba.
La nouvelle Le village rouge se situe à Cardinal, à l’ouest de notre province.
Le roman Ces enfants de ma vie est inspiré de mes sept années auprès de petits immigrants à l’École Provencher de Saint-Boniface.
Mes derniers mois comme enseignante, avant de partir pour l’Europe, se sont déroulés dans un endroit isolé du nord du Manitoba.
Treize ans plus tard, mes souvenirs de ce séjour ont inspiré mon deuxième roman, La petite poule d’eau.
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Chapitre 3 — En tant que journaliste, j’ai fait des reportages dans l’Ouest avec des personnes venues de partout dans le monde.
Dans Fragiles Lumières de la terre, vous trouverez mes écrits au sujet des huttérites installés le long de la rivière Assiniboine au Manitoba, des doukobhors, des mennonites, des Allemands des Sudètes en Saskatchewan et des Ukrainiens en Alberta.
Bien de ces nouveaux arrivants fuyaient les conditions de persécution religieuse ou politique de leur pays natal.
On n’a pas besoin de regarder à l’autre bout du monde pour trouver des exemples de persécution.
Les Métis du Manitoba et de la Saskatchewan sauront vous le dire. Il y a de la persécution dans tous les pays et à toutes les époques de l’humanité, même de nos jours.
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Chapitre 4 — Dans mon parcours de vie, je crois avoir fait honneur aux valeurs de Louis Riel.
Dans ma douzième année, j’ai gagné les plus hauts prix décernés par l’Association de l’éducation pour le français et par le Department of Education pour l’anglais au Manitoba.
Dans ma vingtaine, j’ai été comédienne dans la troupe française du Cercle Molière et de la troupe anglaise du Winnipeg Little Theatre.
J’ai fait des études en théâtre en Angleterre et en France. Comme enseignante, j’ai accueilli des petits immigrants de partout dans le monde.
En tant que journaliste, j’ai côtoyé des peuples de partout et j’ai raconté leurs histoires, leurs rêves et leurs défis.
Mes livres, dont beaucoup touchaient les réalités d’autres cultures, ont été traduits en vingt langues et se sont rendus partout dans le monde.
Peut-être que Louis Riel serait fier, qu’à ma façon, j’ai fait avancer sa vision.