Chaque langue possède ses pépites, ces mots rares ou mal connus qui nous permet d’exprimer certaines nuances sur ce que l’on pense ou ressent. Aujourd’hui, nous vous proposons deux joyaux du dictionnaire : périssologie et compersion. L’un nous parle du trop-plein dans les mots, l’autre du trop-plein dans le cœur.
Périssologie
Le mot vient du grec ancien perissología (περισσολογία), formé de perissós (superflu) et logía (discours, parole). Littéralement : le « discours superflu ». Il est attesté en français dès le XVIIᵉ siècle, dans un contexte souvent rhétorique. La périssologie désigne l’usage redondant de mots ou d’expressions qui répètent inutilement une idée déjà exprimée. Elle peut être accidentelle ou stylistiquement volontaire.
Exemples courants :
– Monter en haut
– Prédire à l’avance
– S’entraider mutuellement
Périssologie ou pléonasme?
Le pléonasme est une forme de périssologie souvent jugée fautive (ou maladroite), alors que la périssologie peut parfois avoir une valeur expressive. Par exemple, dire « je l’ai vu de mes propres yeux » ajoute une forme d’insistance dramatique.
Compersion
Le mot compersion est un néologisme apparu dans les milieux polyamoureux nord-américains dans les années 1970-80, notamment au sein de la communauté Kerista à San Francisco. Il n’a pas encore fait son entrée dans tous les dictionnaires, mais il circule de plus en plus dans les cercles relationnels, éthiques ou spirituels. Il est construit sur le modèle du mot compassion, à partir du latin com- (avec) et percipere (ressentir, percevoir), mais il a été volontairement détourné pour exprimer une émotion positive liée au bonheur de l’autre. La compersion est ce sentiment de bonheur que l’on ressent en voyant une personne aimée heureuse... même si on n’est pas directement impliqué dans cette source de joie. Elle est parfois décrite comme l’inverse de la jalousie.
Exemple typique : Se réjouir sincèrement que son partenaire amoureux ait une relation épanouissante avec quelqu’un d’autre.
Compersion ou compassion?
Ces deux mots ont des racines proches, mais des usages bien distincts :
• La compersion est une joie partagée.
• La compassion est une douleur partagée (ou au moins comprise).
Il est fascinant de voir comment certains mots nous permettent de nommer des subtilités de notre vécu que l’on croyait indescriptibles : le plaisir qu’on éprouve à se sentir inutilement éloquent (périssologie), ou la joie pure devant le bonheur de ceux qu’on aime (compersion). En les ajoutant à notre vocabulaire, on affine notre regard sur le monde — et peut-être même nos rapports aux autres.




